samedi 15 novembre 2008

6..ECONOMIE (CAFE)

Le café est la seconde marchandise échangée dans le monde, derrière le pétrole. On estime à 125 millions le nombre de personnes vivant de la caféiculture, incluant 25 millions de petits producteurs. 400 milliards de tasses de café sont bues par an, soit environ 12 000 tasses par seconde ! Les enjeux économiques et sociaux sont donc extrêmement importants.

L'Organisation internationale du café à laquelle adhèrent quasiment tous les pays producteurs mais aussi les principaux pays consommateurs, collecte en continu les éléments d'information statistique.


*******PRODUCTION
S'agissant de café, l'unité de mesure est le sac de 60 kg.

Depuis plusieurs années, la production mondiale annuelle dépasse les 100 millions de sacs (120 millions en 2002, 102 millions en 2003) ce qui correspond à 6 à 7 millions de tonnes, alors qu'en 1825, on ne produisait que 100 000 tonnes. Plus de 80 millions de sacs sont exportés chaque année (88 millions en 2002, 84 millions en 2003).

Cette production ne cesse d'augmenter ; elle a progressé de 20% entre 1997 et 2005, soit deux fois plus vite que la demande. 20

Le plus gros producteur est de loin le Brésil, particulièrement l'État de São Paulo où se situe le premier port caféier du monde : le port de Santos, suivi par le Viêt Nam (le plus important producteur de robusta) et la Colombie.

La culture du café est rarement une tradition. Dans le cas du Viêt Nam, elle résulte entièrement d’une volonté politique, encouragée par la Banque mondiale, qui a amené le pays à devenir le premier producteur mondial de robusta, alors qu’il n’était que le 31e en 1987. À l'inverse, certains pays africains au premier rang desquels la Côte d'Ivoire ont largement réduit leur production.

Les données statistiques sur la production agricole mondiale de café diffèrent légèrement selon qu'elles proviennent de la FAO (établies sur un mode évaluatif) ou de l'OIC (établies sur un mode déclaratif). Ces données sont cependant suivies mensuellement par l'OIC et recoupées entre elles, ce qui fait de l'Organisation la réelle source de référence reconnue pour les marchés internationaux. Quoi qu'il en soit, au-delà des crises de surproduction ponctuelles et des différences d'inventaire, les volumes produits, échangés et consommés suivent une tendance haussière.


***********PRINCIPAUX PRODUCTEURS
Récoltes de café vert (milliers de tonnes)
déclarées à l'OIC
Année 1984 1994 2004
Brésil 1 284 25% 1 692 30% 2 356 35%
Viêt Nam 14 0% 212 4% 831 12%
Colombie 662 13% 779 14% 684 10%
Indonésie 373 7% 377 7% 443 7%
Éthiopie 139 3% 152 3% 300 4%
Inde 196 4% 169 3% 231 3%
Guatemala 170 3% 227 4% 221 3%
Mexique 260 5% 250 4% 204 3%
Pérou 70 1% 71 1% 201 3%
Ouganda 153 3% 144 3% 165 2%
Honduras 86 2% 131 2% 155 2%
Costa Rica 151 3% 150 3% 107 2%
Côte d'Ivoire 289 6% 180 3% 105 1%
Salvador 134 3% 138 2% 85 1%
Nicaragua 51 1% 41 1% 68 1%
Papouasie 45 1% 68 1% 60 1%
Équateur 83 2% 143 3% 56 1%
Thaïlande 28 2% 84 1% 48 1%
Tanzanie 50 1% 41 1% 48 1%
Cameroun 95 2% 24 0% 44 1%
Kenya 93 2% 100 2% 43 1%
Venezuela 59 1% 56 1% 42 1%
Autres pays 554 11% 397 7% 264 4%
Total 5 039 100% 5 624 100% 6 760 100%

***PAYS PRODUCTEURS DE CAFE SELON L'ICO****
Angola - Bénin - Bolivie - Brésil - Burundi - Cameroun - Colombie - Congo-Brazzaville - Congo-Kinshasa (RDC) - Costa Rica - Côte d'Ivoire - Cuba - Équateur - Éthiopie - Ghana - Gabon - Guatemala - Guinée - Haïti - Honduras - Inde - Indonésie - Jamaïque - Kenya - Madagascar - Malawi - Mexique - Nicaragua - Nigeria - Ouganda - Papouasie-Nouvelle-Guinée - Paraguay - Philippines - Pérou - République dominicaine - République centrafricaine - Rwanda - Salvador - Tanzanie - Thaïlande - Togo - Venezuela - Viêt Nam - Zambie - Zimbabwe

****IMPORTATIONS
Le café est la culture commerciale par excellence : il est produit exclusivement au Sud mais se consomme essentiellement au Nord. Les pays industrialisés consomment environ 70% du café produit dans le monde. Les États-Unis sont les plus gros consommateurs, mais l’Europe a le taux de consommation par habitant le plus élevé : jusqu’à 10 kg par habitant et par an dans les pays scandinaves. En comparaison, la majorité des pays du Sud a une consommation annuelle inférieure à 4,5 kg/hab. En Amérique centrale, plus de 90 % du café est destiné à l’exportation. Toutefois, la consommation de certains pays du Sud, comme le Brésil, augmente rapidement.

Les pays importateurs faisant partie de l'Organisation internationale du café sont l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, Chypre, le Danemark, l'Espagne, l'Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l'Irlande, l'Italie, le Japon, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Norvège, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, le Royaume-Uni, la Slovaquie, la Slovénie, la Suède, la Suisse, les États-Unis d'Amérique et la Communauté européenne. 21

Cinq acheteurs acquièrent presque la moitié de la production mondiale : Kraft, Nestlé, Procter & Gamble et Sara Lee, dont les ventes annuelles génèrent des profits de l'ordre du milliard de $ US, et Tchibo.

********LE COURS DU CAFE
Le cours du café est fixé dans les bourses de matières premières : la bourse de New York traite essentiellement le café arabica et celle de Londres le robusta. Les actes d’achat et de vente du café reposent sur des contrats à terme. En s’immisçant entre l’offre et la demande, la spéculation boursière influence artificiellement les cours et tend à exacerber leurs variations.

Le café n’a cependant pas toujours été soumis à la spéculation boursière. En 1962, au sortir de la colonisation, pays producteurs et pays consommateurs signent le premier Accord international sur le café (AIC), qui garantit un approvisionnement régulier du marché à des prix acceptables pour chaque partie. Pour ce faire, l’AIC prévoyait un système de quotas d’exportation et de rétention et imposait une fourchette de prix. Trois générations d’accords se sont succédé jusqu’en 1989, où le manque de consensus entre pays exportateurs et importateurs conduit à l’abandon de l’AIC.

L’OIC ne semble plus envisager de nouveaux mécanismes d’intervention sur le marché, qu’elle estime « trop difficiles à maintenir ». Les pays exportateurs ont cependant créé en 1993 l’Association des pays producteurs de café (ACPC), sur le modèle de l’OPEP, pour tenter de rétablir la politique de restriction des exportations et de faire remonter les cours. L’annonce de son plan de rétention volontaire des exportations a suscité une vive réaction au Nord, notamment de la part des États-Unis, qui ont alors quitté l’OIC. L’ACPC n’a cependant pas réussi à prévenir la crise des années 1990 : l’abstention des producteurs asiatiques, la difficulté de financer la rétention pour des pays traversant une grave crise économique, et l’importance des stocks détenus par les grandes entreprises caféières du Nord ont eu raison de son entreprise.

Malgré l’échec des accords de produits, leurs partisans font remarquer que le café et les produits agricoles en général ne sont pas des marchandises ordinaires car les caractéristiques physiques des cultures pérennes limitent la possibilité pour les producteurs d'ajuster l'offre séance tenante, ce qui s’accorde mal avec une logique de marché. Selon certains économistes, en l’absence de mécanisme régulateur de la production, de l'offre ou des prix mondiaux, le mécanisme du marché et de la concurrence entre producteurs et consommateurs donnerait lieu à un phénomène de « réaction excessive », caractérisé par l'apparition d'un cycle de surproductions et de pénuries


********LA CRISE DES ANNEES 1990
L'arrivée extrêmement agressive du Viêt Nam sur le marché du café, combinée à l'énorme expansion de la culture au Brésil, sont les deux principales raisons invoquées pour expliquer la chute du cours du milieu des années 1990. Le déclin des prix a cessé depuis 2004, probablement grâce à l'augmentation de la consommation en Chine, en Russie et au Brésil et à une diminution ponctuelle de la production mondiale d'autre part.

Cette crise a mis près de 25 millions de petits producteurs en grande difficulté partout dans le monde. Durant trois ans, le prix du café a chuté d’au moins 50 % et l’on est revenu aux prix pratiqués 30 ans auparavant. Beaucoup de petits exploitants ont dû vendre à perte plusieurs années de suite, ce qui les a naturellement conduit à la faillite. Le chômage directement imputable à cette crise a vraisemblablement affecté environ 1,6 million de personnes, parmi les plus pauvres des pays émergents.

Les pays les plus dépendants du café pour leurs exportations ont dû faire face durant cette période à un grave déséquilibre de leur balance commerciale, qui a conduit à une augmentation de leur endettement. Cette crise a été une catastrophe pour le développement, dont les effets seront encore ressentis pendant longtemps.

*********COMMERCE EQUITABLE
Le café est un des produits phares du commerce équitable. Il fut choisi comme un symbole notamment parce qu'il était le produit le plus exporté après le pétrole et que son prix était fixé par les cours de la bourse des marchés internationaux, bien qu'il soit majoritairement produit par de petits paysans et entreprises familiales.

Les acheteurs disposant de ce label s'engagent à acheter le café à un prix minimum même si les cours mondiaux sont inférieurs à ce seuil (le prix d'achat suit le cours du marché lorsque celui-ci dépasse ce seuil, ce fut le cas entre 1994 et 1997). Ce prix minimum, couplé à un préfinancement des récoltes et une garantie d'achat sur plusieurs années a permis à de nombreux petits producteurs d'améliorer leurs conditions de vie et de ne pas plonger dans la misère lors de la crise du café de 1997 lorsque la chute dramatique des cours (-65%), provoquée par la surproduction, a rendu le prix d'achat du café inférieur à son coût de production.

Le label garantit aussi le versement d'une prime de développement destinée à la mise en place de programmes alimentaires, de santé ou d'éducation.

Chez les grandes marques (Nestlé, Kraft, etc.) le label "commerce équitable" ne représente jamais plus de 5 % des ventes en 2007.


********CAFE BIOLOGIQUE
Un autre type de production, considérée comme plus éthique, est l'agriculture biologique, la seule garantie sans utilisation de pesticides.

Certains produits combinent les standards équitable et biologique.

Le café comme facteur de développement économique : exemple du Brésil
Les cours élevés du marché en 1830 incitent les entrepreneurs du Brésil à passer de l’exploitation de l’or à celle du café, jusque-là réservé à la consommation locale. Cette décision s’accompagne d’importants investissements, tels que, par exemple, la création d’un réseau de près de 7 000 km de chemins de fer entre 1860 et 1885 pour faire face au besoin sans cesse plus important de main-d’œuvre. Les principales régions concernées par ce développement sont celles de Rio de Janeiro et les provinces du sud du pays aux terres fertiles et au climat propice (São Paulo), principales productrices de café24.

Entre l’abolition de l’esclavage en 1888 (le Brésil est le dernier pays à le faire) et l’année 1928, la force de travail est renforcée par une immigration massive : 3,5 millions de travailleurs affluent du Portugal, de l’Italie, de l’Espagne, d’Allemagne et du Japon principalement (Voir les articles : Immigration japonaise au Brésil, Immigration allemande au Brésil, Immigration italienne au Brésil). À São Paulo seul, le nombre de nouveaux immigrants est de 201 000 entre 1884 et 1890 et plus de 733 000 entre 1891 et 1900. Le rendement de la production de café bondit. En 1880, São Paulo produit 1,2 millions de sacs (25% de la production totale), en 1888 2,6 millions (40%), en 1902, 8 millions de sacs (60%)25. Le café représente alors 63% des exportations du pays. Les gains engrangés par ce commerce permettent une croissance économique soutenue au pays.
Le délai de 4 ans entre la plantation d’un caféier et la première récolte amplifie les variations saisonnières dans le prix du café. Le gouvernement se voit donc contraint, en quelque sorte, de soutenir les prix par des subventions en période de forte production. Cette politique de support des prix a comme effet pervers une inflation des plantations à São Paulo, qui a entraîné une énorme surproduction au début des années 1930.

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